Depuis que l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a déclaré, le 14 août 2024, la recrudescence de la Mpox (anciennement variole du singe ou variole simienne), comme une urgence de santé publique de portée internationale (USPPI), une vague d’inquiétude s’est répandue, notamment en Afrique. Parmi les symptômes les plus alarmants de la maladie, les éruptions cutanées ont particulièrement retenu l’attention du public, provoquant des amalgames dans de nombreuses discussions en ligne. Il est essentiel de rappeler que toutes les éruptions cutanées ne sont pas nécessairement le signe de la Mpox, et qu’une approche plus nuancée est nécessaire pour éviter la panique et la désinformation.
Qu’est-ce que la Mpox et comment se transmet-il ?
Selon l’Organisation mondiale de la Santé, le MonkeyPox ou Mpox est une maladie virale causée par l’orthopoxvirus simien. Deux clades du virus sont reconnus : le clade I, qui présente un taux de mortalité plus élevé, et le clade II, associé à des symptômes moins graves. Il convient de noter que le terme « clade » désigne la variation d’un même virus qui diverge au gré des mutations génétiques, tandis que des variants peuvent exister au sein d’un même clade. La flambée épidémique mondiale de 2022-2023 a été principalement causée par le sous-clade IIb. Selon l’Institut Pasteur, la transmission se produit principalement lors de contacts directs avec les lésions cutanées contenant des particules virales ou les muqueuses de personnes infectées. Elle peut également survenir par contact indirect avec des objets contaminés par le virus, tels que la literie ou les surfaces. La maladie peut également être transmise de la mère à l’enfant pendant la grossesse. Enfin, la transmission par voie aérienne, via les gouttelettes respiratoires d’une personne infectée, est envisageable.
Les symptômes de la MPOX
Toujours selon l’OMS, la Mpox se manifeste habituellement par une éruption cutanée qui peut durer deux à quatre semaines. Cette éruption peut être précédée ou suivie de fièvre, de maux de tête, de douleurs musculaires, de douleurs dorsales, d’une asthénie et d’adénopathies (hypertrophie des ganglions lymphatiques). L’éruption ressemble à des cloques ou à des lésions et peut toucher le visage, les paumes des mains, la plante des pieds, l’aine et les zones génitales et/ou anales. Ces lésions peuvent également siéger sur la bouche, la gorge, l’anus, le rectum, le vagin ou les yeux. Il peut y avoir d’une à plusieurs milliers de lésions. Certaines personnes présentent une inflammation à l’intérieur du rectum (proctite) qui peut causer une douleur intense, ainsi qu’une inflammation des organes génitaux qui peut causer des difficultés à uriner. Les formes graves de la Mpox peuvent se manifester par des lésions plus grandes et plus étendues (en particulier dans la bouche, les yeux et les organes génitaux), des surinfections bactériennes de la peau, une septicémie ou des infections pulmonaires. Parmi les complications figurent notamment les infections bactériennes graves dues à des lésions cutanées et les atteintes cérébrales (encéphalite), cardiaques (myocardite), pulmonaires (pneumonie) ou oculaires. Les personnes atteintes de Mpox sont contagieuses jusqu’à ce qu’une croûte se soit formée sur toutes leurs lésions, que les croûtes soient tombées et qu’une nouvelle couche de peau se soit formée dessous, et que toutes les lésions siégeant sur les yeux et sur le corps aient également cicatrisé, ce qui prend généralement deux à quatre semaines.
Qu’en est-il de la situation à Madagascar ?
À Madagascar, bien qu’aucun cas de Mpox n’ait été officiellement déclaré à ce jour (5 octobre 2024), les autorités sanitaires restent vigilantes. Un dispositif de surveillance renforcé a été mis en place dans les aéroports et les ports pour prévenir tout risque d’importation du virus. Dans une intervention médiatisée datant du 16 août 2024, le Dr Brusa Andriamino, Directeur de la Lutte contre les maladies transmissibles au sein du Ministère de la Santé Publique, a déclaré qu’aucun cas de Mpox n’a encore été officiellement recensé à Madagascar. Il a notamment déclaré que des mesures ont été prises en réponse à l’urgence de santé publique de portée internationale déclenchée par l’OMS, face à la propagation de la maladie Mpox. Le Dr Manuella Vololoniaina, Directeur de la Veille sanitaire et de la surveillance épidémiologique et riposte auprès du Ministère de la Santé Publique a quant à elle indiqué que les échanges internationaux importants de Madagascar l’exposent au risque d’importation de la variole du singe. Face à cette menace, un dispositif de surveillance a été mis en place dès 2022. Ce dispositif prévoit notamment le renforcement des contrôles sanitaires dans les aéroports et ports pour détecter tout cas suspect et ainsi prévenir la propagation de l’épidémie. En outre, des spots publicitaires et éducatives sont diffusées depuis quelques semaines, notamment sur la chaîne nationale, pour informer la population sur les symptômes et les modes de transmission de la Mpox, ainsi que les mesures de prévention à prendre
Une différence entre « Nendran’ny gidro » (variole du lémurien) et « Nendran- drajako » (variole du singe)
Dans les interventions médiatiques, les responsables ont utilisé le terme « nendran’ny gidro » dans leurs communications, ce qui peut créer une certaine confusion et engendrer des inquiétudes concernant les lémuriens (primates endémiques de Madagascar). Le Professeur Jonah Rastimbazafy, Primatologue et Président du Groupe d’Étude et Recherche sur les Primates de Madagascar, a tenu à clarifier cette situation en rappelant l’importance d’une terminologie précise pour éviter tout malentendu. Il a souligné que « la variole du singe », comme son nom l’indique, est une maladie transmise par les singes. Par conséquent, tout cas de Mpox à Madagascar serait nécessairement importé. Cependant, cette confusion présente des risques réels pour la faune malgache, en particulier pour les lémuriens. Bien que ces derniers ne soient pas les hôtes naturels du virus de la variole du singe, leur proximité génétique avec les humains et les singes les rend potentiellement vulnérables à certaines maladies. Il a mis en garde sur les risques de la propagation d’informations erronées sur les animaux qui peut entraîner des réactions disproportionnées de la population, telles que des massacres d’animaux ou des incendies de forêt, avec des conséquences désastreuses pour l’économie, le tourisme et l’écosystème malgache. Le Professeur Jonah RATSIMBAZAFY a ainsi appelé les autorités à renforcer la surveillance aux frontières, à mener des campagnes d’information claires et basées sur des faits scientifiques, et à prendre des mesures plus strictes pour limiter les impacts négatifs de cette mésinformation. Selon ses précisions, une communication transparente est essentielle pour préserver la biodiversité malgache et la santé publique.
Source : Entretien avec le Professeur Jonah RATSIMBAZAFY, Primatologue, Président du Groupe d’Etude et Recherche sur les Primates de Madagascar.
Éruptions cutanées : Mpox ou pas Mpox ?
Malgré les assurances des autorités sanitaires quant à l’absence de cas confirmés de Mpox à Madagascar, des inquiétudes persistent au sein de la communauté en ligne, notamment sur les réseaux sociaux. Des publications montrant des éruptions cutanées, notamment dans le groupe de discussion sur Facebook “Harena ny zanaka”, respectivement à la date du 18 août, du 19 août et du 20 septembre 2024 /), ont alimenté les discussions et suscité des interrogations quant à une éventuelle propagation de la maladie.
Pour dissiper ces doutes, le Dr Domoina Soa Kanto Rakotonoely, Médecin généraliste, a rappelé qu’il est essentiel de différencier les symptômes de la Mpox de ceux d’autres affections cutanées fréquentes chez l’enfant. Parmi les éruptions cutanées fréquemment rencontrées à Madagascar, on retrouve :
- La dermatite atopique (eczéma) : Cette maladie chronique se caractérise par des démangeaisons intenses et des lésions cutanées évolutives, touchant principalement les nourrissons et les enfants.
- La gale : Causée par un parasite, la gale provoque des démangeaisons nocturnes intenses et des lésions cutanées caractéristiques. Le Dr Rakotonoely alerte sur une recrudescence de cette affection à Antananarivo.
- Les infections bactériennes : Ces infections peuvent se manifester par des papules, de petites excroissances cutanées sèches et en relief.
Le Dr Rakotonoely précise que, contrairement à ces affections, la Mpox se caractérise par une éruption vésiculeuse ou pustuleuse, accompagnée de fièvre, de malaise général et d’un gonflement des ganglions lymphatiques.
Source : Entretien avec le Dr Domoina Soa Kanto Rakotonoely, Médecin généraliste.
Le dernier mot de WHAT THE FACT
Toute éruption cutanée à vésicule, même suivie de fièvre, n’est pas forcément liée à la Mpox. Face à une éruption cutanée, il est recommandé de consulter un médecin pour établir un diagnostic précis et recevoir un traitement adapté. L’autodiagnostic et la diffusion d’informations non vérifiées sur les réseaux sociaux peuvent générer de l’anxiété inutile et retarder la prise en charge médicale.